Le décret d'application de la loi sur la sécurisation de la 5G ne lève pas les "incertitudes" sur les intentions du gouvernement en matière de choix des équipementiers, a estimé lundi la Fédération française des télécoms.
La loi sur la sécurisation de la 5G, adoptée par le Parlement en juillet, met en place un nouveau régime d'autorisation préalable à l'exploitation des équipements 5G, afin de renforcer la sécurité de ces futurs réseaux face aux risques de sabotage et d'espionnage.
Elle permettra au gouvernement d'interdire aux opérateurs le déploiement d'équipements 5G de tel ou tel constructeur, "s'il existe un risque sérieux d'atteinte aux intérêts de la défense et de la sécurité nationale".
La loi fait suite aux inquiétudes soulevées par l'équipementier chinois Huawei, très en pointe sur la 5G mais considéré aussi par le gouvernement américain et plusieurs de ses alliés comme trop proche du gouvernement chinois.
Mais selon Arthur Dreyfuss, le président de la Fédération française des télécoms, le décret laisse les opérateurs dans le noir sur les futurs critères de décision de l'Etat.
"Nous avons toujours un impérieux besoin de clarification sur quel équipementier nous aurons le droit d'utiliser ou non", a-t-il déclaré à l'AFP.
"Si un équipementier était amené à être interdit sur tout ou partie du territoire, cela pourrait faire prendre un retard considérable au déploiement des réseaux", a-t-il averti.
Selon M. Dreyfuss, la question est d'autant plus cruciale que si un équipementier est interdit sur la 5G sur un territoire donné, les opérateurs seront obligés de changer le matériel déjà existant en 3G et 4G.
"Pour que la 5G fonctionne, il faut qu'elle soit compatible avec la 3G et la 4G déjà installées sur la même antenne", a indiqué M. Dreyfuss.
Les opérateurs télécoms "ne pourraient en aucun cas assumer seuls" financièrement les coûts de démontage et remplacement d'équipements déjà existants, a-t-il indiqué.
"Quand les Etats-Unis prennent une position publique et radicale sur le sujet des équipementiers" en bannissant Huawei, "ils annoncent également accompagner opérationnellement et financièrement l'ensemble des opérateurs qui pâtiraient de cette interdiction", a affirmé M. Dreyfuss.
Le décret d'application de la loi sur la sécurisation de la 5G a été publié samedi au Journal officiel.
Il décrit les informations que les opérateurs doivent fournir dans leurs demandes d'autorisation, mais ne dit rien des critères sur lesquels le gouvernement acceptera ou rejettera les demandes.
Il précise simplement que "le silence gardé par l'administration pendant deux mois sur une demande d'autorisation ou de renouvellement d'autorisation (...) vaut décision de rejet de la demande".