Amazon a accusé directement le président américain Donald Trump d'avoir influencé l'attribution par le Pentagone, fin octobre, d'un mégacontrat de stockage de données en ligne (cloud) de 10 milliards de dollars à Microsoft, selon un document judiciaire rendu public lundi.
Selon le géant du commerce en ligne, le locataire de la Maison Blanche a "mené de manière répétée des attaques publiques et en coulisses" pour qu'Amazon n'obtienne pas le contrat JEDI (Joint Enterprise Defense Infrastructure), d'une durée de dix ans, qui vise à moderniser la totalité des systèmes informatiques des forces armées américaines dans un système géré par intelligence artificielle.
La division Amazon Web Services (AWS), qui domine le secteur du "cloud computing" et fournit des serveurs sécurisés à d'autres organismes gouvernementaux américains, dont la CIA, était considérée comme favorite pour l'obtention du contrat.
Dans un document d'une centaine de pages, le groupe de Seattle estime que l'inimitié de Donald Trump envers le patron d'Amazon Jeff Bezos, "perçu comme un ennemi politique" a joué un rôle conséquent dans la décision du Pentagone.
M. Bezos est la cible fréquente d'attaques virulentes de la part du président républicain, notamment en raison de son investissement dans le Washington Post, un des journaux quotidiens parmi les plus critiques de M. Trump et de son gouvernement.
"Le président des Etats-Unis et commandant en chef de notre armée s'est servi de son pouvoir pour +dégager Amazon+ du contrat JEDI dans le cadre d'une vendetta personnelle et hautement médiatisée contre M. Bezos, Amazon et le Washington Post", affirme le document.
Dans cette plainte, Amazon demande au Pentagone de "réévaluer les offres de manière juste et sans influence inappropriée, directe ou indirecte".
- Mille milliards de dollars -
"La question à se poser est la suivante : le président des Etats-Unis devrait-il être autorisé à utiliser le budget du ministère de la Défense à des fins personnelles et politiques ?", assène le groupe.
Une porte-parole du Pentagone a assuré que la décision avait été prise "conformément au processus normal de sélection des sources" et qu'aucune pression extérieure n'avait été exercée.
Le ministère "est confiant dans son choix d'attribution du contrat JEDI", a-t-elle ajouté.
Cette plainte d'Amazon "va faire du bruit et entraîner des délais dans le démarrage du contrat", constate Daniel Ives, du cabinet d'analystes Wedbush Securities, "mais nous ne pensons pas que cela va changer le résultat".
Ce contrat pourrait avoir un impact de fond sur le marché des services d'informatique à distance, en pleine croissance.
Au troisième trimestre 2019, le marché des services de cloud mondial représentait 27,5 milliards de dollars, 37% de plus qu'il y a un an, d'après le cabinet de consultants et d'études Canalys.
Amazon Web Services comptait pour 33% de ce marché, suivi par Microsoft Azure (14,5%) et Google Cloud (5,6%).
Le contrat JEDI "change la donne en faveur de Microsoft", continue Daniel Ives. "Cette victoire va avoir des conséquences en chaîne pour l'activité cloud du groupe sur des années".
"Cela signale, à notre avis, le début d'une ère où la société de Satya Nadella (patron de Microsoft, ndlr) gagne de plus en plus face à AWS sur un marché du cloud qui va monter à un trillion (mille milliards) de dollars de dépenses pendant la décennie à venir".
dho-juj/leo
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