Le ministre français de l'Economie Bruno Le Maire a plaidé vendredi pour que l'Union européenne développe des "champions européens" dans l'industrie numérique, en particulier dans l'intelligence artificielle (IA).
"On ne va pas faire pour l'IA l'erreur que nous avons faite sur le numérique", a-t-il déclaré en conférence de presse.
"Tirons les leçons de cet échec pour bâtir une initiative sur l'IA, qui nous permette d'avoir un champion industriel européen", a ajouté le ministre, qui a rencontré vendredi la commissaire européenne à la Concurrence, Margrethe Vestager.
La Danoise avait affirmé lundi dans le quotidien belge Le Soir que l'UE ne devait pas aider à la constitution de champions "biberonnés et chouchoutés" mais laisser la concurrence les stimuler.
M. Le Maire a estimé que le commissaire amené à être en charge de l'IA, le Français Thierry Breton, qui doit encore être confirmé par le Parlement européen, disposait de "toutes les compétentes politiques et industrielles".
M. Breton brigue un vaste portefeuille comprenant la politique industrielle, le marché intérieur, le numérique, la défense et l'espace.
Outre l'IA, ce portefeuille englobe notamment les supercalculateurs ou encore la cybersécurité, autant de sujets en lien direct avec le groupe français Atos, qu'il a dirigé pendant 11 ans.
Interrogé sur la place d'Atos dans le "champion européen" qu'il appelle de ses voeux, M. Le Maire a souligné qu'il existait, outre ce groupe, "plein de très belles entreprises du numérique ou de l'IA en France", citant OVH et Dassault Systèmes.
"Un champion industriel de l'IA, ce n'est pas forcément le modèle Airbus, ça peut être un modèle de consortium ou un rassemblement de compétences d'entreprises qui gardent leur autonomie", a-t-il souligné.
Thierry Breton a déjà vendu ses actions et annoncé aux eurodéputés qu'il ne traiterait pas les questions liées à Atos afin d'éviter les risques de conflit d'intérêt.
Le porte-parole de la prochaine Commission -- qui doit entrer en fonction le 1er décembre -- a précisé vendredi que le Français se récuserait "lors de l'attribution d'un contrat ou d'une subvention" à son ancienne entreprise, mais pas sur les secteurs dans leur ensemble.
M. Le Maire a par ailleurs jugé "inconcevable" que le vaste portefeuille attribué à la France soit rogné, rejoignant ainsi Emmanuel Macron: "Ce qui m'importe, c'est le portefeuille !"
Ce positionnement suscite des interrogations chez certains eurodéputés, comme le patron des écologistes, Philippe Lamberts, qui a jugé sur la chaîne française Public Sénat que M. Macron se comportait "comme si la France était propriétaire du portefeuille".
M. Breton "sera-t-il l'homme de Macron à Bruxelles et obéira-t-il à ses ordres ?", s'est aussi interrogée la social-démocrate danoise Christel Schaldemose dans le quotidien allemand Handelsblatt.