La Cour des comptes suggère de "renforcer les obligations juridiques des plateformes numériques" pour mieux lutter contre le commerce de contrefaçons, dans un rapport transmis mardi à l'Assemblée nationale et qui dresse une liste de recommandations.
"A ce jour, les plateformes numériques sont relativement passives dans la lutte contre les contrefaçons", alors qu'elles sont au centre de l'essor du commerce électronique, estimé à 540 milliards d'euros en Europe en 2018, dont 90 milliards d'euros en France.
Assimilées à des hébergeurs de contenus, les plateformes de commerce électronique, comme Amazon, Ebay ou Le Bon Coin par exemple, bénéficient aujourd'hui, au titre de la directive européenne commerce électronique, d'un régime de responsabilité limitée qui n'impose un retrait des produits illégaux qu'après signalement, et n'incite donc pas à "une vigilance active".
"L'insuffisante diligence des plateformes résultant de ce régime (...) est aujourd'hui considérée par les titulaires de droits comme l'un des principaux freins à une lutte efficace contre le développement du commerce de contrefaçons en ligne" et "ce régime d'irresponsabilité des intermédiaires de l'internet est désormais inadapté", remarquent les sages de la rue Cambon.
"Il apparaît aujourd'hui indispensable de renforcer rapidement les obligations légales des plateformes", ajoute la Cour, qui note que la Commission européenne "semble ouverte à cette perspective", et qu'il serait judicieux "d'agir dans le cadre des travaux préparatoires à la révision" de la directive en question.
Les magistrats considèrent qu'il n'est pas "pas suffisant" d'employer des "lignes directrices ou des accords volontaires non contraignants négociés avec les plateformes". Ils font évoluer leur position établie dans leur précédent rapport sur le sujet en 2014, où ils avaient préféré ne pas modifier la directive pour privilégier les dérogations et ajustements sectoriels.
La Cour envisage ainsi deux approches, la première visant à créer un nouveau régime assimilant les plateformes à des éditeurs, la deuxième à leur assigner une obligation de vigilance renforcée, inspirée de la directive droits d'auteurs du 26 mars 2019.
Selon le rapport, les échanges de contrefaçons dans le monde ont représenté 509 milliards de dollars en 2016, soit 3,3% du volume des échanges mondiaux. Dans l'Union européenne, ces marchandises représenteraient 6,8% des importations, et entraîneraient la perte d'au moins 700.000 emplois et 16,3 milliards d'euros de recettes fiscales par an, sans compter les menaces pour la santé et la sécurité du consommateur.
Les Sages recommandent également d'agir au sein du G7 et du Conseil européen pour une meilleure harmonisation des règles de protection de la propriété intellectuelle et des dispositifs de contrôles, de mobiliser et mieux coordonner les administrations françaises, et de renforcer l'information des consommateurs.
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