Les entreprises étrangères en Chine anticipent une baisse d'ampleur de leur chiffre d'affaires au premier semestre pour cause de coronavirus, beaucoup sabrant déjà leurs objectifs annuels, selon des enquêtes publiées jeudi par des chambres de commerce.
Alors que l'économie chinoise reste paralysée par les quarantaines et restrictions de circulation qui perturbent les chaînes de production et étouffent la consommation, ces groupes s'attendent à payer le prix fort.
Sur presque 580 firmes européennes interrogées par les Chambre de commerce européenne et allemande en Chine, près de la moitié s'attendent à voir leur chiffre d'affaires plonger de plus de 10% au premier semestre, tandis que 21% prévoient une baisse moindre.
Peu espèrent se rattraper par la suite: la moitié d'entre elles ont abaissé leur objectif pour l'année.
Principaux motifs d'inquiétude: une chute de la demande pour leurs produits et services, le manque d'employés (en quarantaine ou incapables de voyager), mais aussi les perturbations logistiques qui les empêchent d'être fournies en composants et d'effectuer leurs livraisons.
Certes, Pékin appelle au redémarrage de l'activité et soutient l'économie en baissant les taux d'intérêt et en injectant des liquidités. Jeudi, le gendarme du secteur bancaire (CBIRC) a fait état de quelque 124 milliards d'euros de prêts aux seules entreprises "engagées dans la lutte contre le coronavirus".
Mais "ce n'est pas assez pour remettre l'économie réelle sur les rails", s'alarme le président de la Chambre de l'UE, Joerg Wuttke, lors d'une conférence en ligne jeudi.
Son organisation fustige "les préconditions tous azimuts" exigées par les autorités locales pour autoriser le redémarrage des usines, et "les exigences extrêmement restrictives de quarantaine" pour les employés rentrant de leur région d'origine.
L'horizon reste particulièrement sombre dans la province du Hubei (centre), berceau du coronavirus et coupée du monde depuis un mois, où les entreprises n'ont aucun espoir de retour à la normale avant au moins quatre semaines, selon M. Wuttke.
Parmi 169 firmes américaines sondées par la Chambre de commerce des Etats-Unis, près de la moitié s'attendent à voir leurs revenus 2020 reculer si l'activité ne reprend pas normalement d'ici fin avril. Pour l'heure, environ 10% disent perdre au moins 500.000 yuans (65.000 euros) quotidiennement.
Un cinquième d'entre elles s'attendent à une chute d'au moins 50% de leurs ventes sur l'année si la crise devait se poursuivre jusqu'à fin août.
A travers la Chine, "la majorité des entreprises vont voir leurs revenus plombés, et plus particulièrement les PME", abonde John Moore, patron de la Chambre de commerce du Royaume-Uni, cité dans un communiqué.
Parmi 135 firmes britanniques sondées, la moitié s'attendent à voir baisser leur chiffre d'affaires 2020 de plus de 10%. Plus d'un quart anticipent une dégringolade d'au moins 20% -- pour les seules PME, elles sont quelques 40% à prévoir une telle chute.
De fait, les PME, aux reins moins solides, boivent la tasse, notamment dans les services: "Elles doivent continuer de payer leurs loyers, leurs salaires, combien de temps peuvent-elles tenir?", s'interroge M. Wuttke.
"Pour certaines, le télétravail n'est pas possible. Notre supplique au gouvernement: levez les restrictions dès que possible, région par région, laissez les PME respirer!", plaide-t-il.
De l'avis général, l'épidémie devrait amener les entreprises à repenser leurs chaînes de production en les diversifiant à travers l'Asie.
Des Etats occidentaux pourraient exiger la relocalisation de la fabrication de composants cruciaux, par exemple dans la pharmacie, observe Joerg Wuttke.
Tout en avertissant: "Quitter la Chine n'est pas une option" étant donné la part du géant asiatique dans la croissance mondiale et l'impossibilité de remplacer à la fois son immense marché et ses vastes capacités de production. "Il n'y a pas de seconde Chine".