Les experts du numérique jouent un rôle de plus en plus prépondérant dans la stratégie business des entreprises. Mais les compétences se font rares sur le marché de l’emploi.
Auditeur de biais algorithmiques, protecteur d’identité numérique, ingénieur en destruction des données ou encore prévisionniste en cyber-calamités, voici certains des métiers de demain, qui pourraient se développer plus vite qu’on ne le pense dans les entreprises. Les technologies numériques évoluent à un rythme effréné et certaines innovations sont susceptibles de bouleverser des secteurs d’activités tout entier. Pour ne pas rejoindre la désormais longue liste des organisations « ubérisées », il devient de plus en plus indispensable d’opérer une transformation en profondeur en s’appuyant sur des outils informatiques avancés. Mais encore faut-il être en mesure de les utiliser.
La meilleure technologie du monde ne sera jamais d’aucune utilité sans une personne compétente pour l’exploiter à bon escient. Et plus la technologie devient pointue, plus le besoin de spécialistes se fait sentir. Adzuna, moteur de recherche d’offre d’emploi en ligne, voit fleurir sur sa plateforme des milliers d’annonces pour des recrutement dans les domaines de la robotique, des objets connectés, de l’intelligence artificielle, du RGPD ou encore de la blockchain. La demande est d’ores et déjà forte et elle ne va pas aller en diminuant. Ne manque donc plus que les candidats. Et c’est là que les choses commencent quelque peu à se gâter.
Des métiers méconnus
La fameuse génération Z, celle qui a grandi smartphone à la main dans un monde ultra-connecté, est celle qui sera naturellement appelée à occuper ces nouvelles fonctions digitales dans les années à venir. Il semblerait toutefois que les choses ne soient pas aussi simples. Selon une étude publiée par l’association Talents du Numérique, même si plus de 70 % des lycéens ont conscience que le numérique interviendra dans leur futur métier, ils sont 60 % à ne pas souhaiter se diriger vers le domaine de l’informatique. La perspective d’intégrer un secteur ultra-dynamique et susceptible de jouer un rôle majeur dans l’évolution de nos sociétés ne séduit pas autant que peuvent l’espérer de nombreux recruteurs. Pourquoi ce désintérêt ? Les résultats de l’enquête délivrent une piste importante : la méconnaissance des métiers du numérique.
Si l’on ne peut évidemment pas reprocher à la jeune génération de ne pas connaître des métiers qui n’existent pas encore, de nombreuses fonctions déjà bien implantées dans les organisations leurs sont étrangères, qu’il s’agisse de métiers d’ingénierie, comme le data scientist (60 % indiquent n’en avoir jamais entendu parler) ou l’ingénieur cloud computing (49 %), ou de profils moins techniques, comme le digital brand manager (63 %) ou le responsable éditorial online (53 %). Si les futurs entrants sur le marché du travail sont largement immergés dans le numérique dans leur vie quotidienne, il apparaît qu’ils manquent de visibilité sur les opportunités qu’il offre d’un point de vue professionnel, mais surtout sur l’importance qu’il a pris dans la stratégie business des entreprises. Pour plus de 80 % des lycéens, le secteur du numérique est encore largement associé à l’informatique, aux mathématiques et à la programmation, alors qu’il dispose aujourd’hui d’une aura bien plus large.
De consommateur à acteur du numérique
En matière de numérique, plus que d’éducation, c’est donc de formation dont les nouvelles générations ont besoin. Alors qu’elles maîtrisent déjà les rouages du web social et collaboratif, exploitent largement les capacités de l’informatique mobile et s’abonnent naturellement à des services cloud, un cap reste à franchir pour les amener de l’autre côté de la barrière, et passer du stade de consommateur du numérique à celui d’acteur. Pour cela, de nouvelles formations apparaissent avec un double objectif : attirer davantage de candidats et répondre aux besoins du marché.
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C’est le cas par exemple de l’EM Lyon Business School, qui vient de créer un institut dédié à l’IA appliquée au management. De la technologie de pointe donc, mais directement liée à la stratégie, à la gouvernance et au business model des entreprises. Autre exemple avec l’EMLV (École de Management Léonard de Vinci), qui proposera à la rentrée 2019 une formation en alternance « Business Transformation & IA ». Dans un autre domaine, l’ESGI (École supérieure de Génie Informatique) a créé en 2017 un mastère ingénierie de la Blockchain. Objectif : mettre la cryptographie au service de la transformation des entreprises. Ces formations supérieures ne sont toutefois que le sommet de la pyramide, dont les fondations doivent être posées dès les premières années d’enseignement en faisant découvrir aux plus jeunes les opportunités qui se présentent à eux. Et elles sont nombreuses. Car à l’ère de l’économie digitale, les leaders du numérique seront les leaders des entreprises.