Trois influentes sociétés de conseil, Glass Lewis, ISS et Frontis, ont appelé ces derniers jours les actionnaires de Telecom Italia (Tim) à voter contre la proposition du groupe français Vivendi de remplacer cinq administrateurs proches du fonds américain Elliott.
Les actionnaires devront se prononcer lors de l'assemblée générale du 29 mars sur cette proposition et leur remplacement par des personnalités "indépendantes".
Vivendi, principal actionnaire de Tim, juge que cinq membres du conseil d'administration (CA), dont le président Fulvio Conti, sont "responsables de nombreuses irrégularités et d'infractions répétées", organisant notamment des réunions du "CA parallèle".
Dans un avis publié tard mercredi, Glass Lewis estime que les argumentations de Vivendi sont basées davantage sur des "allégations spécieuses et des divulgations partielles (...) que sur des faits objectifs". Il juge également que les documents présentés sont "peu clairs concernant les stratégies alternatives pour Tim" et qu'une "expansion de l'influence de Vivendi dans le conseil n'est pas justifiée".
Néanmoins, Glass Lewis souligne que cela ne veut pas dire que l'actuel CA ne soit pas "privé de problèmes de crédibilité", rappelant que le collège des commissaires aux comptes a montré que M. Conti ne fournissait pas les mêmes informations à tous les administrateurs.
Frontis et ISS ont eux aussi recommandé ces derniers jours un statu quo.
"Malgré les préoccupations sur de possibles asymétries d'informations à l'intérieur du conseil, dues à des réunions séparées tenues par des administrateurs nommés par Elliott, et au manque d'une indépendance rigoureuse de ces administrateurs, nous sommes encore plus préoccupés par la possibilité que Vivendi reprenne le contrôle du conseil", écrit Frontis, en évoquant "ses mauvaises pratiques en terme de gouvernance" et un risque de "conflits d'intérêts".
Telecom Italia est au coeur d'un différend entre ses deux principaux actionnaires, Vivendi qui possède 23,9% de son capital, et Elliott, qui en détient directement 9,4%.
En mai 2018, Elliott a ravi à Vivendi le contrôle du CA, puis en novembre, les dix administrateurs proches du fonds ont décidé la révocation surprise d'Amos Genish, qui dirigeait le groupe depuis 14 mois et est considéré comme un proche de Vincent Bolloré, le patron de Vivendi.
A l'approche de l'AG du 29 mars, les deux actionnaires multiplient les attaques, s'accusant mutuellement des mauvais résultats du groupe, qui a subi une perte nette de 1,4 milliard d'euros en 2018, et de la chute du cours en Bourse, qui a cédé 32% en un an.
Interrogé par l'AFP sur les recommandations des sociétés de conseil, un porte-parole de Vivendi a souligné que le groupe était "satisfait" que ces dernières aient noté "les irrégularités révélées par le collège aux commissaires aux comptes" et affirmé que "Vivendi ne souhaitait pas prendre le contrôle de Telecom Italia".
Vivendi "souhaite un CA indépendant, plus équilibré et agissant dans l'intérêt de tous les actionnaires, et pas seulement de celui d'Elliott", a-t-il indiqué.
Elliott juge de son côté que les candidats de Vivendi sont "insoutenables", car "pas réellement indépendants": "ils redonneraient simplement le contrôle à un groupe caractérisé par les conflits d'intérêt".
Dans un communiqué publié jeudi soir, le conseil d'administration de Tim, dominé par les administrateurs proches d'Elliott, a réaffirmé sa "pleine confiance dans le président" Conti, dont "rien ne permet de mettre en discussion l'indépendance", et dans le directeur général Luigi Gubitosi.
Il a souligné que l'éviction de M. Genish était "la conséquence d'une progressive perte de confiance dans ses capacités à affronter efficacement" la situation.
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