L'utilisation du numérique pour les démarches des usagers ne sera efficace que si les procédures sont au préalable simplifiées et les moyens humains et financiers adaptés, met en garde mardi la Cour des comptes dans son rapport annuel.
Pour la première fois, ce rapport, point d'orgue de l'action de la haute juridiction financière, consacre plusieurs enquêtes à l'utilisation du numérique au service de l'action publique.
Elle s'est notamment intéressée à la dématérialisation de la délivrance de titres (pièce d'identité, permis de conduire, etc.) par les préfectures, au dossier pharmaceutique, à la numérisation des demandes de logement social ou encore au "système d'information des ressources humaines dans l'éducation nationale" (Sirhen) et aux services numériques de Pôle emploi.
Si la transformation numérique "permet d'améliorer les services rendus aux usagers" et qu'"un bon usage (...) peut améliorer sensiblement l'efficacité des acteurs publics", ces impacts positifs "ne sont pas toujours au rendez-vous" et des "fragilités" limitent l'atteinte des ambitions de transformation, constate la Cour.
La Cour pointe ainsi plusieurs risques qui pénalisent le succès d'une telle démarche.
L'enjeu en amont de "simplification des procédures" ne doit notamment pas être perdu de vue. La numérisation de procédures compliquées "risque d'être peu efficace et même de les rendre encore plus complexes", prévient-elle. Elle cite comme exemple les déboires des préfectures avec la dématérialisation des délivrances des cartes grises, alors que cette transformation s'est mieux passée pour les permis de conduire ou les cartes d'identité.
La haute juridiction financière souligne le besoin "d'accompagnement" des usagers, parfois peu à l'aise avec l'outil numérique, comme l'a montré son enquête sur la demande de logement social, rappelant la problématique d'une fracture numérique dans certains territoires.
Par ailleurs des freins peuvent exister au sein de l'administration: le manque de personnels suffisamment qualifiés, un défaut constaté par exemple au sein des ministères financiers qui ont longtemps peiné à attirer les jeunes diplômés, ou encore des lacunes en terme de pilotage à moyen et long terme, mises notamment en lumière dans le fiasco du système Sirhen, abandonné en 2018 après 13 ans d'errements et 400 millions d'euros engloutis.
La Cour rappelle par ailleurs que le développement de services numériques efficaces suppose des investissements importants, notamment dans des outils de pointe, mais qui "ne doivent pas conduire à négliger la maintenance des logiciels plus anciens".