Le rôle de l'Autorité bancaire européenne (ABE) doit être renforcé afin d'améliorer le dispositif de lutte anti-blanchiment au niveau européen, a défendu vendredi François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France.
"Une gouvernance rénovée, renforcée en matière de lutte anti-blanchiment passe par le renforcement du rôle de l'Autorité Bancaire Européenne", a affirmé le banquier central lors d'une conférence de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), instance française de supervision et de contrôle des banques et assurance, qu'il dirige.
"Des contre-exemples récents et retentissants intervenus dans d'autres pays européens ont montré la nécessité de renforcer le dispositif de supervision européen", a-t-il souligné.
Depuis deux ans, les scandales liés au blanchiment d'argent se sont multipliés en Europe entre la banque maltaise Pilatus Bank, au coeur de malversations financières révélées par Daphne Caruana Galizia, journaliste assassinée en octobre 2017 et la faillite de la troisième banque de Lettonie, ABLV, accusée par Washington de blanchiment d'argent.
Enfin, la banque danoise Danske Bank est au coeur d'une affaire portant sur le blanchiment entre 2007 et 2015 d'environ 200 milliards d'euros au travers de sa filiale estonienne, qui a éclaboussé au passage Deutsche Bank.
"Chacun sait que la France aurait souhaité que la réforme des autorités européennes de surveillance aille plus loin, mais sachons saluer le verre à moitié plein, avec des pouvoirs accrus pour l'Autorité bancaire européenne en ce domaine", a concédé M. Villeroy de Galhau, vantant le renforcement des échanges d'informations entre autorités financières européennes.
Sur cette base, l'ABE "pourra par exemple enjoindre aux autorités de lutte anti-blanchiment concernées de mener des investigations supplémentaires ou d'envisager des mesures correctrices".
Le banquier central a appelé à la constitution d'un "réseau fort de superviseurs européens en matière de lutte anti-blanchiment", piloté par l'ABE.
Ce réseau "devrait avoir la capacité juridique et les moyens humains, dans les cas les plus graves, de mener, lui directement, des actions conjointes d'urgence ou de se substituer temporairement à un superviseur national dans les pays ou les secteurs les plus exposés aux risques de blanchiment".
Cette solution "nous paraît plus efficace et plus rapide que la création, parfois évoquée, d'une nouvelle agence européenne unique en charge de la lutte anti-blanchiment", a-t-il conclu.
Cette prise de position intervient alors qu'en avril, l'ABE, chargée de coordonner et d'harmoniser le travail des superviseurs bancaires nationaux, avait été largement critiquée à Bruxelles pour avoir abandonné une enquête. Demandée par l'exécutif bruxellois, l'investigation visait les superviseurs danois et estoniens dans le cadre de l'affaire Danske Bank.
cgu/ef/lem
DANSKE BANK